Service à la personne et propreté. Le casse-tête de sortie de crise
Les entreprises de propreté, comme leurs homologues dans le secteur du service à la personne, peinent à recruter.
« La période est très très difficile, je n'ai jamais connu cela et beaucoup de mes collègues de la région non plus. Les remplacements d'été vont être vraiment compliqués à assurer, mais je n'ai pas le choix. Mes salariés qui ont été présents durant toute la pandémie ont besoin de souffler et de revoir leur famille et de retourner dans leur pays cet été » se désespère Laurent Deveau directeur général de S2N Propreté et Services et de Orkin France. La situation décrite par ce chef d'entreprise niçois ne concernent pas des renforts ponctuels et saisonniers auxquels les sociétés de nettoyage font appel occasionnellement en période estivale, mais bien des agents expérimentés qui préfèrent prolonger leurs droits au chômage et refusent un CDD ou des compléments d'heures.
Les cas de salarié ayant changé de métier, où restés dans leur pays d'origine après le 1er confinement ne sont pas rares non plus.
Augmenter les salaires
« Pour recruter j'utilise beaucoup les réseaux sociaux comme linkedin, des sites comme Indeed mais également des jobs dating que j'organise avec différents organismes comme les missions locales ou Pôle emploi » se désole le dirigeant d'une entreprise de propreté qui connait bien les causes du mal, au-delà de la conjoncture inédite de ces derniers mois. « La reconnaissance de nos métiers passe par la formation de nos agents, leur accompagnement mais aussi et surtout une meilleure rémunération, c'est une question clé. Chaque fois que je le peux j'augmente le salaire horaire jusqu'à 1,50 € que je répercute sur mes clients. Il faut arrêter de dire que ce n'est pas possible et que la seule issue est de faire du volume ! ».
Pas sûr donc qu'il juge suffisant l'accord sur la rénovation des classifications d'emploi, signé récemment par les partenaires sociaux, même s'il s'agit d'une étape nécessaire pour une meilleure reconnaissance du métier.
Le service à la personne en burn out
Les dirigeants d'entreprises de services à la personne sont unanimes : de plus en plus de demandes, de moins en moins de moyens humains pour y répondre correctement. La crise majeure, voire la catastrophe, vécue par les Ehpad depuis plus de 18 mois a conduit de nombreuses familles à privilégier le maintien à domicile de leurs parents, même très âgés. Dans le même temps des auxiliaires de vie, épuisés par la pandémie et/ou découragés par le manque de reconnaissance ont décidé de quitter le métier. Pour les retenir le Gouvernement s'est engagé à permettre l'augmentation des salaires de 13% à 15% au 1er octobre 2021. Une mesure salutaire, mais qui ne concerne que les aides à domicile employés par une association, soit environ la moitié des effectifs du secteur !
La levée de bouclier des « laissés pour compte » (salariés et employeurs) face à ces annonces devrait conduire Brigitte Bourguignon, la Ministre en charge du dossier de combler cet oubli en proposant dans les semaines qui viennent une revalorisation des salaires plus équitable.
Réduire le travail au noir
« L'appel d'air pour notre secteur viendra aussi, en principe au 1er janvier 2022 de la mise en place de l'avance immédiate des aides aux servcies à la personne. Au lieu d'attendre parfois jusqu'à 18 mois pour bénéficier d'un crédit d'impôt de 50% les particuliers ne paient plus que ce qui est réellement à leur charges. Nous sommes dans une situation comparable à celle des pharmaciens lorsque le tiers payant a été mis en place. Ils ont enregistré une hausse d'activité de 30%. L'effet se fera également sentir sur le travail au noir qui ne se justifiera plus » conclut Philippe Cazes-Carrère fondateur et dirigeant du groupe APR et de la marque Übi, dédiés aux services à la personnes dans le Sud-Ouest de la France.